Et si au lieu de se marier avec son amoureux ou son amoureuse, on se mariait avec son ou sa meilleure amie ? Et si au lieu d’élever des enfants en couple, on les élevait en co-parentalité, avec des amis ? Et si les relations les plus importantes de notre vie devenaient nos amis, et non nos conjoints ou conjointes ? Si ces idées peuvent paraître originales, elles ont le mérite de soulever une question centrale : quelle place donnons-nous à l’amitié dans notre société ? Car même si la plupart des gens s’accordent à dire que leurs amis ont une place importante dans leur vie, nous avons collectivement tendance à hiérarchiser ces relations comme étant moins importantes que les relations amoureuses ou familiales. Et ce n’est pas un simple fait culturel, il s’agit d’une hiérarchie implantée dans les institutions et les lois. On obtient pas de jour de congé pour la mort d’un ami, quand on l’obtient pour la mort d’un conjoint. On n’obtient pas d’avantage fiscal si on vit avec un ami, quand on peut en obtenir si on se marie. La place que nous donnons à l’amitié a quelque chose de très politique, et c’est cet aspect là que la journaliste Alice Raybaud a décidé d’étudier dans son livre « Nos puissantes amitiés », où elle se pose cette question : Pourquoi le couple romantique représenterait-il l'unique façon de cheminer avec d'autres dans l'existence ? Lors de son enquête, elle a découvert que celles et ceux qui ont fait de l’amitié leur priorité ont créé des espaces de résistance face aux aliénations du système patriarcal, capitaliste et dans une période de grande incertitude écologique. Hétéros ou queers, entre femmes, entre hommes ou dans des groupes mixtes, elles et ils sont nombreux à réinventer, entre ami.es, des manières de militer, d'habiter, de consommer, de faire famille, de vieillir ensemble et, finalement, de prendre soin les un.es des autres. Alors pourquoi l’amitié est-elle un sujet éminemment sérieux et fondamental, comment pourrait-elle nous permettre de faire dissidence avec le système actuel et nous émanciper collectivement ? Réponse dans cette émission pour Blast.
Crédits photo/illustration en haut de page :
Diane Lataste