L’essayiste Pierre Madelin le rappelle dans son livre La Tentation écofasciste : « Le carbofascisme implique une fuite en avant à tous les niveaux. Accro aux combustibles fossiles, totalement indifférent aux conditions écologiques de sa survie, il est disposé à emporter dans sa tombe le legs de plusieurs milliards d’années d’évolution. »

Nous l’avons vu. Le lien entre nationalisme et énergies fossiles est de plus en plus fort, cette idée d’asseoir sa domination à travers l’extractivisme sur son propre sol incarné par le « Drill baby drill » de Donald Trump. Mais c’est aussi au nom du nationalisme et de la « protection des Américains » que Trump justifie ses politiques anti-écologiques. Le collectif Zetkin le rappelle, le carbofascisme ne peut être dissocié du racisme. L’écologie est instrumentalisée pour appuyer son discours xénophobe, selon lequel l’écosystème humain, celui de la nation, est le premier écosystème que nous devons protéger. « Chaque fois que l’extrême droite européenne nie ou minimise l’importance de la crise climatique, elle fait simultanément une déclaration sur l’immigration […] L’inverse est également vrai. »

Face au péril écologique, l'extrême droite se pose aussi et surtout comme celle qui rassure, qui dit aux citoyens qu’il n’y a pas de problème ou qu’il n’est pas si grave (contrairement au sujet de l’immigration), qu’elle ne touchera pas à leur mode de vie, à leur steak, à leur voiture… Que l’on peut tout à fait continuer comme avant…

En juin 2024, Le journaliste Grégory Rzepski écrivait, dans Le Monde diplomatique : « Les droites radicales poursuivent désormais un même objectif malgré leurs différences : défendre ce fameux “mode de vie“ résumé par le slogan de la Confédération Liberté et indépendance en Pologne, “une maison, une pelouse, un barbecue, deux voitures, des vacances“ ; toutes dénoncent des idéologies — islamiste, écologiste, wokiste, globaliste — qui leur paraissent concourir à anéantir la civilisation ou à l’ensauvager. »

Le parti d’extrême droite polonais a d’ailleurs fait un score record aux élections européennes de 2024 tandis que l’AfD, parti d’extrême droite néonazi et climatosceptique, s’est imposé comme la seconde force politique d’Allemagne avec un score historique de 20,8 % et 152 députés au Bundestag lors des législatives du 23 février dernier. Ce même parti s’emportait en 2023 contre « l’hystérie irrationnelle du CO2 qui détruit structurellement notre société, notre culture et nos modes de vie », et soutenait en 2019 que « le dioxyde de carbone n’est pas un polluant mais un élément indispensable à la vie ». Ce même parti est activement soutenu par Elon Musk ou encore le vice-président étasunien JD Vance.

Quelques jours après cette élection, CNN titrait : « L’extrême droite fait un score immense dans un pays autrefois considéré comme un champion du climat, et ce schéma se répète partout dans le monde. » Le carbofascisme progresse…

Alors qu’en 2021, la question écologique était au cœur de la campagne des législatives en Allemagne, elle a été totalement mise de côté cette année, et remplacée par l’immigration. Une victoire pour l’extrême droite dans la bataille culturelle. En France non plus, lors des dernières législatives, l’écologie n’a pas été un sujet. Et le Rassemblement National (RN) a réalisé une percée avec, désormais, 121 députés à l’Assemblée nationale.

Dans une interview pour Usbek et Rica en juin 2024, Antoine Dubiau, auteur du livre Écofascismes, affirmait : « Si jamais le RN arrivait au pouvoir, c’est plutôt le concept de carbofascisme qui serait utile pour l’analyse. Celui-ci désigne une convergence d’intérêts dans la défense des énergies fossiles entre cette industrie, qui cherche à préserver ses intérêts économiques directs, et l’extrême droite qui défend des modes de vie occidentaux largement adossés à l’exploitation des hydrocarbures. »

La menace n’est donc pas seulement aux États-Unis puisque le RN se rapproche dangereusement de la rhétorique de Trump, et par conséquent d’une forme de carbofascisme. Son programme s’articule principalement autour d’un rejet des mesures écologiques, considérées comme « punitives ». Les régulations, les taxes ou encore les éoliennes sont rejetées en bloc. Il n’est question que de localisme, d’énergie nucléaire et de critique des accords de libre-échange. L’extractivisme ou le capitalisme fossile ne sont jamais remis en question. Le RN se vante de protéger les Français mais a voté contre la loi pour l’interdiction des polluants éternels. Le parti n'a jamais vraiment reconnu la nécessité de mettre en place des mesures d’adaptation aux effets du dérèglement climatique qui nous frappent déjà : inondations, incendies…

Si le trumpisme en est la version la plus dystopique, le même schéma se répète partout : des gouvernements libéraux qui prétendaient autrefois être des défenseurs du climat délaissent ce sujet et multiplient les retours en arrière, se laissant imposer leurs priorités par l’extrême droite.

L’élue démocrate américaine Alexandria Ocasio-Cortez le soulignait en 2019 : « Ceux qui diffèrent l’action climatique ne sont pas mieux que les climato-négationnistes. Si les uns ou les autres obtiennent ce qu’ils veulent, on est grillés. »

Ce que ne semblent pas réaliser beaucoup de gouvernements qui se disent encore démocratiques, c’est l’étendue des conséquences à venir de la politique carbofasciste des États-Unis, à commencer par peut-être l’une des plus dangereuses de ses manifestations : la destruction de la science et des connaissances. La fabrique de l’ignorance.

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Cher Louis Sarkozy - Boxing Day #28

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