« Les chiens » d’Alain Jessua, conte prophétique et funèbre du macro-lepénisme

« Les chiens » d’Alain Jessua, conte prophétique et funèbre du macro-lepénisme

C’est chez des cinéastes mal estimés en leur temps qu’on trouve les meilleures descriptions du présent politique. Parmi ces auteurs, Alain Jessua occupe une place de choix. Réalisateur d’une petite dizaine de films au total, cet adepte (rarissime dans le cinéma français) de l’anticipation (à ne pas confondre avec la science-fiction) fut souvent taxé d’exagération ou de grossièreté. Pourtant, il explorait les mêmes thèmes et intuitions que des cinéastes aussi célébrés que David Cronenberg (« Chromosome 3 » sort sur les écrans la même année que « Les chiens ») ou Georges Romero (le fabuleux « Dawn of the dead » est sorti un an avant) de manière moins sanglante et bien plus ancrée dans la réalité quotidienne hexagonale. A ce titre, « Les chiens » apparait d’une puissance visionnaire étonnante : Jessua y dépeint avec 40 ans d’avance les petits entrepreneurs politiques de la peur, les Retailleau, Darmanin, Zemmour, Le Pen et consorts, transformant les tenants de l’ordre social en bêtes enragées contre toute forme d’altérité, au risque d’entrainer la société tout entière vers l’asphyxie et la mort.