Au soir des élections européennes, le 9 juin, les deux principaux partis d'extrême droite en France, le Rassemblement national et Reconquête, ont cumulé près de 37 % des suffrages exprimés. À lui seul, le parti de Marine Le Pen récolte plus du double des voix de la majorité présidentielle. Sur les plateaux, comme lors des entre-deux-tours, certains commentateurs et journalistes font grise mine ou surjouent la stupéfaction. Mais c'est un peu comme des serpents qui se mordent la queue. Car pendant plusieurs mois, les médias dominants n'ont cessé de renforcer la notoriété publique de la tête de liste du RN : Jordan Bardella. Tous supports confondus : presse, TV, radio. France 2, allant jusqu'à organiser un débat de prime time entre le candidat du RN et le Premier ministre Gabriel Attal, qui n'était pourtant pas candidat à ces élections européennes. Dans la roue du service public, les médias ont reproduit la même hiérarchie en commentant ce match jusqu'à la nausée pour un seul résultat : mutiler le pluralisme, peser sur le processus électoral et promouvoir l'extrême droite. Mais au lendemain du scrutin, face aux critiques qui leur sont adressées, les commentateurs les plus en vue font ce qu'ils savent faire de mieux : balayer toute remise en cause d'un revers de main. Autant le dire sans détour, la responsabilité des médias dominants dans la normalisation de l'extrême droite est écrasante. Pourquoi l'extrême droite ne fait-elle plus peur en 2022 ? Ça reste une bonne question. Mais puisque les journalistes sont incapables de se regarder dans le miroir pour y répondre, on va tenter de le faire pour eux. Nouvel épisode de 4e pouvoir, avec Acrimed.
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Morgane Sabouret